attac Neuchâtel

Victoire des mouvements citoyens pour l’eau contre Nestlé

Conférence de presse
Sao Lourenço, Minas Geraïs, Brésil et Nestlé

Mercredi 26 avril 2006 à Neuchâtel (Suisse)

Un petit historique

Bevaix, canton de Neuchâtel, Suisse

La lutte contre Nestlé à Sao Lourenço (Etat du Minas Geraïs, Brésil) est liée étroitement à la campagne d’opposition que Attac Neuchâtel a mené en automne 2001 contre la demande par Nestlé d’une concession de prélèvement d’eau minérale au puits de Treytel à Bevaix. Nestlé demandait une autorisation de pompage au même puits que la commune, ce que la loi interdit formellement. Cette campagne s’est soldée par l’abandon pur et simple par Nestlé de ce projet en janvier 2002. J’aimerais juste préciser que le dossier déposé à l’Etat de Neuchâtel dès le 15.08.01 par Me Châtelain de La Chaux-de-Fonds faisait état d’une demande au nom de Nestlé. Même si cette multinationale a toujours nié sa présence dans ce projet, les faits écrits officiels font bien état de la présence de Nestlé. Nestlé annonce qu’elle abandonne ce projet en janvier 2002 parce que, selon elle, l’eau n’avait pas les qualités requises, une figure de style bien connue utilisée par ces multinationales pour ne pas reconnaître leur défaite, face à une opposition populaire. Plus de cent vingt oppositions de citoyens de la commune de Bevaix ont été déposées au gouvernement neuchâtelois.

Le lien avec le Brésil

C’est à cause de l’action d’Attac contre la demande d’autorisation et du retrait de Nestlé à Bevaix, annoncés par la presse que Franklin Frederick , militant actif au Brésil pour la sauvegarde de l’eau comme un droit humain et un patrimoine de l’humanité, contacte Attac-NE par un ami pour lui demander son aide . C’était le 28 janvier 2002. Avec Ernst Zürcher, professeur à l’Ecole du Bois de Bienne, Attac et Troupe-Eau mettent sur pied une conférence de presse (12.02.2002) sur la situation conflictuelle de Sao Lourenço, où Nestlé, ayant repris Perrier-Vittel, amplifie le pompage de l’eau dans le parc d’eau thermale de cette ville. Ayant fait construire une enceinte murale de plusieurs mètres de profondeur et de hauteur autour des installations de pompage et d’embouteillage, Nestlé a porté une atteinte durable au site du parc d’eau. De plus l’eau est déminéralisée pour l’embouteillage, ce qui est contraire à la loi brésilienne.

Au bout de quelques années de pompage intensif , à une profondeur non autorisée, l’abaissement de la nappe phréatique mise trop à contribution a provoqué un tassement important du terrain et le tarissement d’une source thermale. Elle est perdue définitivement.

Un mouvement de citoyens de Sao Lourenço mais aussi des trois autres villes voisines possédant aussi des parcs d’eau a porté plainte devant la justice sans obtenir de résultats immédiats. En janvier 2004, à l’Open Forum de Davos, M. Brabeck , patron de Nestlé, annonce, dans une confrontation avec Franklin Frederick, que Nestlé cesse ses activités à Sao Lourenço. Ce qui se révélera faux sur le terrain.

En mars 2004, Franklin Frederick invite trois personnes militantes de Suisse pour participer à des débats dans divers lieux du Brésil. Nous avons plusieurs rencontres à Brasilia avec des députés de l’Assemblée fédérale, avec le secrétaire général de la Conférence épiscopale du Brésil, avec diverses associations. Dans la région des parcs d’eau thermale, une assemblée importante regroupant des militants des quatre villes du Circuit des eaux du Minas Gerais a permis de remettre en perspective la lutte pour que Nestlé cesse toute activité sur place à Sao Lourenço. Deux jours après notre rencontre avec les députés, le Département fédéral concerné par l’eau faisait publier dans la Feuille officielle un arrêté interdisant l’exploitation de la source Primavera de Sao Lourenço. Il faudra encore plusieurs mois pour que Nestlé obtempère.

La déclaration œcuménique sur l’eau

En avril 2005, Les Eglises chrétiennes ( catholiques et réformées) du Brésil et de la Suisse signent une déclaration œcuménique sur l’eau. C’est un événement important aussi du point de vue civil, car les Eglises s’engagent à faire reconnaître l’eau comme un droit humain. De plus , elle tiennent à apporter leur contribution pour les êtres humains de notre Terre ait un accès inconditionnel à l’eau.

Mgr Odilo Scherrer, secrétaire la conférence épiscopale du Brésil, participe à une rencontre de travail sur l’eau au COE à Genève. C’était en juillet 2005. Le COE est vivement intéressé à donner une impulsion en accord avec l’Eglise catholique à la reconnaissance de l’eau comme un droit humain. Il s’engage également pour que l’eau soit accessible par chacun. Cette rencontre est importante dans le cadre de la lutte des mouvements citoyens pour l’eau .

Dom Balduino
Président de la commission épiscopale de la pastorale de la terre et de l’eau au Brésil, dom Balduino participe en octobre 2005 à diverses rencontres sur l’eau, sur la fabrication industrielle des aliments et le comportement des multinationales au Brésil et en Colombie.

L’expérience de foi et de sagesse de cette évêque en lien avec les milieux ruraux et l’eau a été enrichissante lors des rencontres au COE à Genève, à Peseux dans un cadre régional, et lors du tribunal populaire sur Nestlé en Colombie, organisé par des syndicats et mouvements tiers-mondistes regroupés en Multiwatch à Berne ( consulter le site internet www.multiwatch.ch). La venue de Dom Balduino a constitué certainement une pression supplémentaire sur Nestlé au Brésil.

L’accord signé par Nestlé et par un procureur du Minas Gerais

Sur dénonciation du mouvement des citoyens pour l’eau de Sao Lourenço, un procès contre Nestlé a été entrepris par un procureur de la ville. Nestlé a toujours essayé de contourner la situation en affirmant que le mouvement des citoyens de Sao Lourenço ne disait pas la vérité et que l’entreprise aurait respecté toutes les règles de la concession et de la loi.

Le 16 mars 2006 pour éviter un procès qui aurait nui à son image, Nestlé signe un accord avec le Procureur de Sao Lourenço , accord qui confirme la véracité de toutes les accusations faites contre Nestlé. Nestlé cesse ses activités de pompage et d’embouteillage et s’engage à reboiser une partie du parc. La campagne menée en Suisse autour du cas de Nestlé au Brésil a joué certainement un rôle décisif pour aboutir à ce résultat. C’est une victoire importante pour les citoyens qui se sont engagés à rendre visible le comportement inacceptable de Nestlé dans le parc d’eau thermale de Sao Lourenço.