Conseil oecuménique des Églises
Bureau de la communication
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« On peut oeuvrer pour la vie ou pour la mort. Nous, au COE, nous avons choisi la vie. » | ||||
A l'arrêt du tram, on aperçoit un groupe bigarré engagé dans une discussion animée. Ce sont douze femmes et hommes venus d'Allemagne, d'Argentine, du Canada, de Chine, des Etats-Unis, de Grande-Bretagne, d'Inde, du Kenya, du Mexique, de Russie, de Suisse et du Zimbabwe à La Haye, aux Pays-Bas, pour assister à la Sixième Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Le temps maussade n'a pas réussi à les décourager. La bonne humeur règne au sein du groupe de travail du Conseil oecuménique des Eglises sur les changements climatiques - même si ces changements et leurs effets sur la vie des populations ne prêtent guère à rire. Le tram emmène le groupe de l'hôtel au centre des congrès. Au programme, une manifestation publique à l'église Zorgvliet toute proche. La délégation est conduite par David Hallmann, du Canada. Il nous explique comment le groupe voit son rôle : « Notre tâche est d'apporter un point de vue éthique, moral et théologique à la conférence. Les difficultés et les problèmes peuvent être insurmontables dans une entreprise comme celle-ci, et nous voulons apporter une vision qui soit source d'espérance. Avec l'aide de Dieu, les choses peuvent changer. » Durant la discussion d'experts qui suit, des membres du Parlement néerlandais apportent leur soutien unanime au Protocole de Kyoto de 1997. En vertu de ce document, les nations se sont engagées à réduire leurs émissions de gaz carbonique et à se fixer des objectifs précis. Au début de la conférence, seuls trente pays en développement avaient ratifié le Protocole. Les bureaucrates, les diplomates et les ministres sont maintenant en train de se quereller au sujet de l'adoption et de la mise en oeuvre de cet instrument. Elias Abramides, membre argentin de la délégation oecuménique, demande aux membres du Parlement ce qu'ils proposeraient pour un pays tel que l'Argentine, qui ploie sous le fardeau de la dette mais dont on attend en même temps qu'il réduise ses émissions de dioxyde de carbone. Là encore, les représentants du monde politique sont unanimes : c'est le problème de l'Argentine. Les membres du groupe de travail ne peuvent que hocher la tête. Nafisa D'Souza, elle aussi, hoche la tête d'un air inquiet. Elle travaille auprès de groupes autochtones en Inde. Elle est affolée à l'idée que les pays occidentaux pourraient échapper à leurs responsabilités en finançant des programmes de reboisement. « Je ne peux pas m'empêcher de penser à ce que toutes ces grandes phrases veulent dire pour les gens. Et que se passe-t-il si les gouvernements et les sociétés plantent des forêts à des fins commerciales et que les populations locales ne peuvent pas les exploiter ? » Pour Elias Abramides, le zèle avec lequel les pays occidentaux se sont appliqués à réduire leurs émissions de gaz carbonique - sur le papier du moins - est une tromperie. « Je n'en demande pas beaucoup. Les Etats puissants doivent penser aux véritables enjeux de cette affaire. S'ils ne réduisent pas sérieusement leurs émissions de gaz à effet de serre, la Terre est peut-être condamnée. » Le COE suit de près les politiques internationales concernant les changements climatiques depuis 1988. Son groupe de travail a pris part à tous les grands sommets des Nations Unies et cela représente un gros travail. Il y a tant de monde, tant de réunions et tant de décisions politiques. Comme les autres, Marijke van Duin est souvent épuisée : « Ça vous vide complètement. Il faut faire attention à ce que cela n'aille pas trop loin. La difficulté, c'est de faire de tout petits pas concrets sans perdre de vue la totalité du problème. » Tous les membres de la délégation font ces petits pas dans leurs pays d'origine et leurs régions. L'important, c'est que les gens se rendent compte des changements climatiques. Déjà, on sent que quelque chose a changé. « Nous avons commencé avec une idée seulement », dit Jesse Mugambi, du Kenya, parlant du travail qu'il fait en Afrique. « Maintenant, nous organisons des ateliers dans les villages et les gens apprennent à s'adapter aux changements, par exemple en construisant des réservoirs d'eau qu'ils utilisent pendant la saison sèche. » Pour Jesse Mugambi, l'un des signes du réchauffement climatique est la fonte du capuchon neigeux du mont Kenya. « On peut oeuvrer pour la vie ou pour la mort », dit-il, commentant les négociations du sommet. « Nous, au COE, nous avons choisi la vie. » Pendant le sommet sur le climat, le groupe de travail se réunit presque tous les jours. Les membres parlent de leurs projets respectifs, discutent de la tournure des événements au sommet et décident de l'affectation des fonds. Mais il y a toujours du temps pour les échanges personnels et, le jour de la Saint-Nicolas, Larisa Skuratovskaya accueille tout le monde avec des chocolats qu'elle a apportés de chez elle, en Russie. Les membres de la délégation puisent aussi des forces à la Kloisterkeerk de La Haye où ils célébrent un service oecuménique avec les membres de la paroisse et des participants à la conférence. Une centaine de personnes chantent dans toutes les langues, tandis que le sermon et les prières sont centrés sur la création de Dieu. Après le service, les paroissiens les invitent à un buffet composé selon les principes de l'écologie. Mais, ils ne peuvent s'attarder, car le président de la conférence donne lui aussi une réception à laquelle ils doivent assister pour s'assurer que la perspective de l'équipe oecuménique est bien représentée. A la séance plénière de la conférence, la position de la délégation oecuménique est exposée par le pasteur Angelique Walker-Smith. Douze organisations non gouvernementales (ONG) ont été autorisées à monter à la tribune. Dixième sur la liste des orateurs, le Conseil oecuménique des Eglises est la seule organisation religieuse appelée à s'exprimer. « Je suis un peu nerveuse », avoue Angelique Walker-Smith au journaliste qui l'interviewe à la télévision. « Nous sommes convaincus que les négociations sur les changements climatiques devraient se recentrer sur la formule qui satisfait le mieux aux critères d'efficacité écologique, de justice, de responsabilité et de rendement économique, la priorité de la réduction des émissions revenant aux pays ayant des taux de pollution par habitant élevés », souligne-t-elle dans son intervention. « L'humanité tout entière est faite à l'image de Dieu et selon sa ressemblance, et la nature tout entière porte les marques de Dieu. L'héritage de Dieu nous revient à tous, et nous tous, c'est aussi la nature. » Les membres de la délégation oecuménique espèrent que leur message sera entendu. « Si ce n'est pas aujourd'hui, ce sera demain », dit Bonnie Wright, du Zimbabwe, qui affirme son entière confiance en Dieu. « Dieu fera en sorte que nous empruntions la bonne voie. » La journaliste allemande Mirjam Schubert a accompagné l'équipe oecuménique du COE qui assistait à la Sixième Conférence des parties (CoP6) à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Photo de Angelique Walker-Smith à la conférence
Le Conseil oecuménique des Eglises (COE) est une communauté de 337 Eglises. Elles sont réparties dans plus de 100 pays sur tous les continents et représentent pratiquement toutes les traditions chrétiennes. L'Eglise catholique romaine n'est pas membre mais elle collabore activement avec le COE. La plus haute instance dirigeante du COE est l'Assemblée, qui se réunit environ tous les 7 ans. Le COE a été formé officiellement en 1948 à Amsterdam, aux Pays-Bas. Le secrétaire général Konrad Raiser, de l'Eglise évangélique d'Allemagne, est à la tête du personnel de l'organisation.
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