Pour Despina D. Prassas, déléguée nord-américaine du patriarcat oecuménique, la Décennie, grâce aux nombreuses initiatives qu'elle a suscitées, a permis aux femmes de se mobiliser pour leur propre cause. Dans de nombreux pays, elle a été inaugurée par des célébrations particulières. Les femmes orthodoxes se sont réunies entre elles en Crète. De nombreuses Eglises, associations ou mouvements ont adopté des résolutions à l'occasion de leur synode ou de leur assemblée générale. A le mi-Décennie, le travail d'évaluation fait par le COE à l'occasion de visites aux Eglises a permis de relancer l'intérêt pour la Décennie oecuménique ("Lettres Vivantes" donne un bon aperçu des enseignements de ces visites).

Les femmes Africaines continuent de se poser la question: mais que s'est-il donc passé ? "Comment notre continent a-t-il pu en arriver là?", s'interroge Biasima Lala, de la République démocratique du Congo. L'Afrique croule sous le poids de la dette et subit de plein fouet les politiques d'ajustement structurel. Face à ce constat, la Décennie a suscité auprès des femmes une prise de conscience de leur implication particulière dans l'économie de leur pays du fait du rôle qu'elles jouent dans ce domaine. Elles ont pu ainsi approfondir les mécanismes de l'économie, notamment au niveau local. Le rôle de l'éducation a aussi été davantage pris en considération.

Les hommes se sont aussi exprimé à la tribune. Deenabandhu Manchala constate que son pays, l'Inde, assiste passivement aux violences faites aux femmes. Il s'agit d'une violence structurelle imposée par le système des castes et du patriarcat que la religion se complaît à sanctifier dans une attitude complice. Les chiffres sont éloquents. En Inde, on ne compte plus les femmes violées, enlevées ou torturées. En l'espace d'une année, plus de 7000 épouses ont été tuées tout simplement parce que leur dot n'était pas suffisante aux yeux de leur mari. D'une manière générale, les femmes sont les premières victimes de la misère, des épidémies et des catastrophes naturelles. Or trop souvent, les Eglises restent inactives devant cette état de fait qu'elles ont tendance à justifier par le contexte social et culturel. De ce point de vue, la Décennie leur a permis de prendre un peu plus conscience du problème.

Pour le Métropolite Ambrosius d'Oulu, de Finlande, la Décennie a "aidé à jeter un regard plus critique sur certaines des limites que connaissent aujourd'hui les processus de décision et les structures de pouvoirs de nos Eglises". Le Métropolite orthodoxe s'est montré rassuré et confiant: "Au début, certaines Eglises traditionnelles ont eu quelques réserves. Mais peu à peu, nous avons découvert que la Décennie n'était pas un mouvement féministe - peut-être aurions-nous besoin de cela aussi - mais quelque chose qui concerne l'ensemble de l'Eglise, la compréhension qu'elle a d'elle-même et sa nature ecclésiale."

Pour la kenyane Mukami Mc Crun, qui vit actuellement en Ecosse, le racisme est l'une des plaies qui oppriment la femme et renforce la détresse de sa condition. Malheureusement, la Décennie n'aura guère permis une prise de conscience du fait de son peu d'impact auprès des Eglises. "Partout on a constaté un écart flagrant entre les paroles et les actes" ajoute de son côté Béatrice Y. Wood pour qui nul doute que le combat continue: "La Décennie en tant que projet est terminée et maintenant nous regardons devant nous et nous travaillons comme partenaires de Dieu au cours de ce voyage qui nous mènera vers le jour où toutes les visions de justice et de réconciliation seront accomplies. Ce jour-là, la terre sera remplie de la connaissance de la gloire du Seigneur comme les eaux couvrent la mer."

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